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Disclosure of Corporate Information to Trade Unions in North America

Disclosure of Corporate Information to Trade Unions in North America

Hem C. Jain

Volume : 36-4 (1981)

Résumé

La divulgation aux syndicats des renseignements sur l’activité des entreprises

Des groupes de pression, comme les consommateurs et les syndicats, ont manifesté beaucoup d'intérêt pour tout ce qui touche à la divulgation de l'information en général. En matière de relations de travail, la nécessité d'informer le public est reconnue depuis fort longtemps. Mackenzie King en faisait état à la fin de la première guerre mondiale. À la fin de la décennie 1970, de nombreux syndicats ont fait des représentations aux gouvernements en ce sens. Ils se plaignaient qu'ils ne connaissaient pas la situation financière des entreprises non plus qu'ils ne pouvaient être assurés de la véracité des statistiques publiées relativement aux profits et à la productivité.

Le but de l'article, si l'on admet qu'il n'y a que très peu de renseignements fournis aux syndicats par les entreprises en Amérique du Nord, et encore moins au Canada, est de combler ce vide en étudiant la législation et les pratiques des entreprises relativement à la divulgation de l'information, en énonçant les arguments favorables ou opposés à la divulgation, en exposant les problèmes que de telles mesures soulèvent, en faisant valoir la nécessité pour les entreprises d'avoir une politique en cette matière et en indiquant les initiatives possibles de la part des gouvernements.

L'intérêt pour cette question ressort d'abord de la crainte ressentie par les syndicats face à la tendance à la concentration des pouvoirs économiques des entreprises entre les mains des multinationales alors que le gouvernement a failli à la tâche d'obliger ces entreprises à répondre des décisions qui peuvent avoir un effet néfaste sur l'emploi et l'économie canadienne dans son ensemble. Il ressort aussi de l'expérience passée en matière des mises à pied et de réduction de personnel. Aussi, les syndicats souhaiteraient-ils avoir une information systématique au sujet des changements projetés dans la main-d'oeuvre de manière à pouvoir influencer les décisions administratives. Les changements technologiques, l'automation, les déplacements de production d'une usine à l'autre, les transferts de propriétés sont autant de transformations qui peuvent avoir une influence profonde sur la vie personnelle des travailleurs.

D'une façon générale, la divulgation de l'information est perçue tant par les syndicats que les employeurs, comme un outil destiné à renforcer leur pouvoir de négociation. Il ne s'agit pas tant de savoir si l'information devrait jouer un rôle dans la négociation collective que de vouloir pour toutes les parties un accès égal à l'information. Pour les syndicats, la divulgation veut dire que les employeurs possèdent certains renseignements qu'ils ne connaissent pas et concernant lesquels ils voudraient obtenir des explications. Le Congrès du travail du Canada a identifié plusieurs catégories de renseignements qu'il estime nécessaires aux syndicats comme le statut de l'entreprise, sa situation de concurrent sur les marchés, sa production et sa productivité, sa structure financière, son budget, ses profits pour l'avenir, son organigramme, etc., mais ce n'est pas tant l'abondance des données qui compte que les renseignements utiles à la négociation et à l'administration des conventions collectives.

Jusqu'ici, au Canada, la divulgation d'informations imposée aux entreprises a eu principalement pour objet de permettre aux actionnaires et au public de prendre des décisions sages dans le domaine des investissements, mais cette législation nes'applique pas aux compagnies privées qui forment tout de même le quart de toutes les entreprises importantes du pays. Aucune loi, par ailleurs, n'impose aux employeurs l'obligation de renseigner les syndicats, si ce n'est par le biais de l'obligation de négocier de bonne foi. Aux États-Unis, on a interprété la loi de façon que le refus d'informer les syndicats était considéré comme une violation de cet impératif législatif, mais il s'ensuit que les entreprises, qui sont financièrement faibles, s'empressent d'ouvrir leurs livres et servent ainsi leurs causes, tandis que les compagnies financièrement fortes ne crient pas à la pauvreté et elles échappent à l'obligation d'ouvrir leurs livres.

Il en va autrement au Canada. LeCode canadien du travail stipule bien que tout employeur doit fournir au Ministre du travail les renseignements se rapportant aux salaires de ses employés, à leur horaire de travail, aux congés et aux vacances. D'autre part, dans les législations des provinces, il est prescrit que les employeurs et les syndicats doivent négocier de bonne foi, mais, on a été jusqu'ici incapable de définir exactement le sens de ''bonne foi". Aucun tribunal canadien n'a encore eu la témérité d'éprouver la conduite d'un employeur en quantifiant l'offre salariale.

Même si l'information fournie aux actionnaires peut être utile aux syndicats, ce n'est pas toujours de ce genre de renseignements dont ils ont besoin. En règle générale, cette information n'est pas assez détaillée; elle fournit surtout des indications sur le passé de l'entreprise, mais elle ne contient que peu de choses touchant son développement et ses projets pour l'avenir.

S'il y a, par ailleurs, des arguments favorables à une certaine diffusion de l'information aux syndicats, d'autres arguments militent au contraire. Et ceci s'applique tant aux employeurs qu'aux syndicats. À une époque où la libre entreprise est fortement attaquée, il peut y avoir avantage pour les employeurs à la faire connaître mieux et plus profondément à leurs salariés et au public en général, de faire ressortir la complexité des tâches qu'il lui faut assumer ainsi que le rôle qu'elle joue dans la vie sociale. De plus, pour les employeurs, la divulgation de certains renseignements aux syndicats peut favoriser l'entente et la compréhension, clarifier les objectifs de la négociation. Elle permet encore d'exposer publiquement les projets relatifs à l'amélioration de la qualité de la vie en milieu de travail. Quant aux dirigeants syndicaux, ils estiment qu'une diffusion plus complète de renseignements de nature financière ou autre est nécessaire à une négociation collective objective et rationnelle. En résumé, les employeurs considèrent que la diffusion de l'information est de nature à influencer le comportement des salariés, à modérer leurs exigences. Pour leur part, les syndicats pensent qu'une meilleure information permettrait de redresser la balance du pouvoir en faisant des partenaires égaux.

Toutefois, tout le monde est loin de partager ce point de vue optimiste. Pour certains spécialistes des relations professionnelles, les questions financières et économiques n'ont que peu d'influence sur le déroulement des négociations. Tandis que pour d'autres, la diffusion de renseignements donnerait un pouvoir de négociation trop considérable aux syndicats. Nombre d'employeurs croient que les négociateurs syndicaux manquent de l'expérience et de l'entraînement nécessaires pour bien interpréter les questions de comptabilité et de finance. Ils craignent aussi que la divulgation de renseignements d'ordre économique et financier mette en danger la position concurrentielle de l'entreprise et même son existence.

En résumé, on voit que les syndicats et les employeurs, même lorsqu'ils sont d'accord sur la nécessité de diffuser de l'information, recherchent des fins différentes sinon opposées. C'est pourquoi il faut tenir à la fois compte du comportement des parties, du caractère confidentiel de certains faits ou de certaines données, du choix de l'information, de sa préparation, de sa présentation, de l'utilisation que l'on peut en faire, des personnes à qui elle doit être divulguée, des fins auxquelles elle peut servir.

Comme certaines entreprises diffusent volontairement des renseignements à leurs employés et aux représentants syndicaux, il serait utile et intéressant de négocier des ententes à ce sujet. Ces accords pourraient porter sur les points suivants: la liste des renseignements à donner, le moment où ils devraient être fournis, le niveau de l'entreprise qui se chargerait de la diffusion, la fréquence de l'information, le type de renseignements qu'on garderait confidentiels, la mise en place d'un mécanisme qui permettrait de régler les différends en cette matière.

De leur côté, les gouvernements devraient prendre certaines initiatives législatives et rendre obligatoires des mesures qui obligeraient les employeurs à fournir aux syndicats et à leurs représentants certaines informations utiles dans la négociation collective.

On peut conclure que, d'une façon générale, les syndicats favorisent une plus grande diffusion de l'information et que cela serait de nature à améliorer les relations professionnelles. Les employeurs se montrent beaucoup plus réticents. L'expérience des pays européens indique qu'il ne suffit pas d'adopter des lois cependant. Mieux vaut que la diffusion de l'information se fasse sur une base volontaire. Aux employeurs, il importe de rappeler qu'une politique de divulgation de l'information ne saurait être efficace que dans la mesure où elle est perçue par les employés et leurs représentants comme le résultat de la consultation entre les deux partenaires. Aux syndicats, il s'impose de prendre les moyens nécessaires pour évaluer objectivement les renseignements dont ils disposeront.

Trois conditions sont nécessaires pour qu'une telle politique réussisse: la divulgation doit se faire sur une base volontaire; il faut que la diffusion des renseignements soit établie à la suite de négociations entre les parties; il importe d'adopter certaines dispositions législatives qui mettent à la portée des syndicats les renseignements déjà disponibles.