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Bullock and the Aftermath

Bullock and the Aftermath

Adolf Sturmthal

Volume : 32-3 (1977)

Résumé

Le rapport Bullock et ses répercussions

Cette étude présente sommairement les recommandations du rapport Bullock publié plus tôt cette année; elle étudie les moyens d'instaurer la démocratie industrielle en Angleterre.

Depuis longtemps déjà, mais surtout depuis les événements de 1968-1969, on cherche à mettre au point les mécanismes les plus aptes à l'instauration de la démocratie industrielle.

L'auteur signale, au départ, que cette recherche s'inspire de la décision de la Communauté économique européenne d'adopter un type de loi des compagnies différent de celles qui gouvernent les sociétés multinationales dans les pays où elles font habituellement affaire. La CEE favorise un système uniforme qui s'inspirerait de la législation de l'Allemagne de l'Ouest parce qu'on estime que cette législation a beaucoup contribué au redressement économique de ce pays après la guerre et au maintien d'un haut degré de paix industrielle.

L'auteur rappelle ensuite les principales caractéristiques du système allemand, soit la représentation des travailleurs aux deux paliers de la société: au conseil de surveillance qui détermine la politique générale de l'entreprise ainsi qu'au bureau de direction chargé de l'application de cette politique. La principale originalité de la démocratie industrielle en Allemagne consiste donc dans la représentation des travailleurs au sein de l'entreprise. Minoritaire au départ, cette représentation est devenue paritaire aux conseils de surveillance l'an dernier.

La tradition britannique, où l'on conçoit les syndicats comme les adversaires du capital, s'oppose à ce genre d'institutions. Face à l'État et aux employeurs, la démocratie industrielle y repose sur la négociation collective, le monopole syndical de représentation des travailleurs et le rejet de la théorie marxiste selon laquelle l'enjeu de la lutte serait la propriété des moyens de production.

Pour illustrer son opinion, l'auteur cite un certain nombre d'exemples. Ainsi, en 1929, lors de l'étatisation du système de transport dans la région londonienne, le Ministre des transports s'est gardé de nommer des représentants des travailleurs au bureau de direction. Les parties sont arrivées à un compromis selon lequel, non pas le syndicat représentant les travailleurs de l'entreprise, mais le mouvement syndical y serait représenté par des spécialistes en relations du travail qui n'étaient responsables qu'au Ministre.

Plus tard, en 1944, le rapport de la Commission de reconstruction d'après-guerre recommanda que des syndicalistes d'expérience soient nommés aux bureaux de direction, mais on y émettait l'opinion qu'il ne saurait être question que les représentants des travailleurs « s'assoient des deux côtés de la table en même temps ». Le rôle du syndicatétait conçu comme une force destinée à faire échec au capital plutôt que son partenaire dans la direction des entreprises. D'ailleurs, lorsqu'on parlait de participation des travailleurs à la direction des entreprises, on ne visait que les entreprises nationalisées et non pas le secteur privé.

Les choses en restèrent là jusqu'au début des années 60, alors qu'une minorité des membres de la Commission Donovan souleva de nouveau le problème de la participation des syndicats à la direction des entreprises. Le gouvernement travailliste en tint compte en favorisant des expériences en ce sens, tout en reconnaissant que la négociation collective restait encore la meilleure méthode de promouvoir la démocratie industrielle.

Au début des années 70, avec l'entrée de la Grande-Bretagne dans la CEE et le développement spectaculaire de l'économie allemande, l'idée de la participation des travailleurs à la gestion refit surface et, en 1973, leTrade-Union Congress publia un exposé sur le sujet. Celui-ci favorisait nettement la participation des travailleurs au sein des bureaux de direction. Cette demande s'appuyait sur le fait que la négociation collective ne touchait pas aux politiques générales des entreprises, en particulier à leur financement, à leur aménagement et à leur fermeture, toutes questions où se trouvent engagés les intérêts vitaux des travailleurs. Cette déclaration adoptée, le contenu en fut discuté avec les instances du Parti travailliste d'où ce qui a été connu depuis sous le nom decontrat social. En échange de l'acceptation volontaire par les syndicats de certaines mesures de contrôle des salaires, diverses réformes furent promises et, parmi elles, une forme quelconque de démocratie industrielle.

En vue d'en préparer l'aménagement, une commission d'enquête fut instituée en 1975 sous la présidence de Lord Bullock, historien de grande renommée. La majeure partie de ses membres était formée de personnes rattachées au Parti travailliste. Trois de ses onze membres appartenaient aux syndicats. Ses recommandations ne devaient s'appliquer qu'au secteur privé de l'économie.

Le TUC acceptait l'idée de la participation des travailleurs à la direction telle qu'elle existait en Allemagne, mais rejetait l'existence des conseils ouvriers. Le TUC exigeait une représentation égale à celle des propriétaires si on acceptait un système à double palier. Si on retenait l'idée d'un seul bureau, le TUC acceptait une représentation minoritaire de ses membres subordonnément à ce que les administrateurs n'aient pas droit de vote et que le nombre des représentants des actionnaires ne dépasse pas celui des représentants des syndicats. La parité entre actionnaires et ouvriers ne devait pas conduire à une impasse, le président, choisi à tour de rôle entre les deux groupes, ayant voix prépondérante ou encore un président indépendant pouvant être choisi. On n'y prévoyait pas non plus la représentation des consommateurs à ce bureau de direction.

Le rapport de la Commission, qui compte plus de deux cent pages, fut remis au début de 1977. Les recommandations du rapport se rapprochent beaucoup des suggestions du TUC et on y référé fréquemment au système allemand. Le rapport recommande le maintien du bureau de direction unique. Les décisions fondamentales au bureau de direction vont de la liquidation de la société à la nomination et au renvoi des cadres supérieurs.

La proposition de la Commission qui fut la plus controversée fut celle de la constitution du bureau suivant la formule « 2X ± Y », soit une représentation minoritaire mais égale des actionnaires et des employés exigeant la présence d'un troisième groupe dans le bureau de direction qui serait désigné sur l'accord de la majorité des deux groupes. En principe, cela signifiait que la constitution du bureau de direction devait se faire entre le bureau de direction existant et les syndicats reconnus. S'il n'y avait pas d'accord dansles six mois, la loi prescrirait, l'application de la règle « 2X ± 1Y ». Le président serait choisi parmi les représentants des actionnaires, à moins que le bureau de direction n'en décide unanimement autrement.

Le problème délicat de la négociation collective est considéré dans le rapport avec un optimisme surprenant, alors qu'il s'inspire de l'expérience suédoise où, cependant, la loi défend la participation des représentants syndicaux dans les bureaux de direction aux négociations collectives.

Depuis la publication du rapport, qui s'est inspiré largement des propositions du TUC, on s'est rendu compte que celui-ci ne représentait pas l'unanimité des syndicats affiliés sur le sujet. Il y eu opposition au rapport tant de la gauche que de la droite du mouvement syndical. D'un côté comme de l'autre, certains syndicats veulent s'en tenir, pour des motifs différents, à leur rôle d'adversaires ou d'opposants au capital.

D'autre part, les trois représentants du patronat se sont fortement désolidarisés des principales recommandations de la Commission. Ils ont préconisé le système allemand de représentation à deux paliers et laConfédération of British Industry a décidé de combattre les propositions du rapport et a menacé, si celles-ci étaient traduites dans une législation, de refuser de participer à des consultations avec le gouvernement.

L'auteur conclut que le rapport a reçu un mauvais accueil de la part de l'opinion publique, même si celle-ci favorise certaines formes de représentation, qu'il va beaucoup plus loin que les circonstances ne le permettent présentement, non seulement en Grande-Bretagne, mais dans les autres pays industrialisés.